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Les vapoteurs belges pris au piège

Le 24 mars, les vapoteurs ont cru quelques heures qu’ils allaient pouvoir se ravitailler via des achats en ligne. Dans un premier temps, le SPF Santé Publique a pensé autoriser la vente en ligne, avant de se raviser.

En Belgique, comme la plupart des commerces non alimentaires, les boutiques de vape ont fermé leurs portes le 18 mars à midi dans le cadre des mesures prises par les autorités fédérales pour empêcher la propagation du coronavirus.

L’espoir durant quelques heures

Dans la matinée du 24 mars, un article de rtl.be soulève tous les espoirs en annonçant une autorisation exceptionnelle de vente en ligne. “Les magasins d’e-cigarette doivent fermer mais peuvent vendre en ligne et faire des livraisons”, a d’abord communiqué Vinciane Charlier, porte-parole du SPF (Service Public Fédéral) Santé Publique, au site d’infos belge. Malheureusement, le soulagement fut de courte durée, le SPF faisant machine arrière.

L’UBV-DBD, associations de vapoteurs, a tenté d’interpeller Maggie De Block, la ministre de la Santé, sur les réseaux sociaux, pour obtenir la réouverture de ces magasins, mais n’a pas obtenu de réponse.

“Situation ubuesque”

Tanguy Doucenet, de l’UBV-BDB

La situation outre-Quiévrain est donc catastrophique pour les vapoteurs. Nous avons contacté Tanguy Doucenet, président de l’UBV-DBD, le 25 mars. Son mandat de 3 ans est arrivé à son terme, mais sans relève pour le moment, il assure donc la transition. “Nous avions eu des contacts avec un journaliste de RTL qui avait pu avoir une réponse du cabinet De Block lui disant que la vente en ligne était à nouveau autorisée exceptionnellement. L’article est sorti sur rtl.be, puis il a été immédiatement démenti. J’ai aussi eu un contact avec le cabinet Ducarme, ministre fédéral des Classes moyennes, des Indépendants, des PME, de l’Agriculture et de l’Intégration sociale, qui n’était pas au courant. Nous sommes dans une situation ubuesque, comme d’habitude en Belgique. Actuellement, il ne reste aux vapoteurs que quelques fioles à acheter illicitement dans les night shops (supérettes de nuit, ndlr).”

L’association de vapoteurs a interpellé le SPF Santé Publique et attendo une réponse. “Aujourd’hui, le vapoteur belge doit vivre sur ses réserves, avoir recours à la solidarité, s’arranger avec un Français ou trouver des produits au marché noir, s’inquiétait Tanguy Doucenet. Il peut aussi évidemment revenir à la cigarette, c’est le risque que nous avons mis en avant quand nous avons contacté le SPF. Mais ils n’ont pas beaucoup de temps à nous accorder pour le moment, vu la situation actuelle.”

Des pros prêts à livrer

Mickael Espadana, gérant de Belgacig

Du côté des professionnels, place à la rancœur et à la désillusion. “La décision d’autoriser la vente en ligne à l’intérieur de la Belgique aurait été logique pour protéger le marché, mais même ça, ça a été refusé, déplore Mickaël Espadana, gérant de Belgacig. Pour nous imposer les mêmes lois que celles liées au tabac, pas de problème, par contre dans ce cas, nous ne pouvons pas ouvrir et nous ne sommes pas considérés comme indispensables à la santé des gens, c’est paradoxal. Certains magasins ouvrent quand même, d’autres livrent, mais ils prennent d’énormes risques.”

Les boutiques reçoivent de plus en plus de messages de clients qui n’ont plus de stock, malgré les mises en garde répétées des professionnels, avant le confinement. Et malheureusement, beaucoup vont replonger dans la cigarette. “C’est ce que j’ai dit au SPF : ‘c’est le travail de plusieurs années, pour essayer de faire arrêter des gens de fumer, qui est réduit à zéro.’ ”, constate Mickaël Espadana. Pour l’instant, les gérants de boutiques n’ont aucune solution à leur offrir. “Mais nous sommes prêts si la situation évolue favorablement, nous avons préparé un site de vente en ligne en urgence. Dès que nous avons le feu vert, nous pouvons l’ouvrir en 24 heures”, déclare le gérant de Belgacig.

Quel est votre sentiment à l’heure actuelle ? “Ça montre bien la place de la cigarette électronique en Belgique. Nous sommes déjà l’un des pays d’Europe avec le plus d’interdiction et le plus contrôlé.”

Des mesures prises pour les entreprises

Heureusement, le gouvernement belge a mis en place quelques aménagements au niveau fédéral qui permettent de soulager les entreprises comme l’étalement de la TVA ou le recours au chômage temporaire pour cas de force majeure. Dans la région de Bruxelles-Capitale, une prime unique de 4 000 euros est versée pour chaque entreprise obligée de fermer à la suite des décisions du Conseil de sécurité nationale. Le gouvernement accorde une prime unique de 4 000 euros pour chaque entreprise obligée de fermer à la suite des décisions du Conseil de sécurité nationale. 

En Wallonie, la SOWALFIN, la SRIW et la SOGEPA apporteront une garantie sous diverses formes aux entreprises en difficulté de trésorerie. Le gouvernement wallon a annoncé le mercredi 25 mars que les entreprises et indépendants de moins de 50 travailleurs contraints de fermer ou d’arrêter leurs activités pour cause d’épidémie de coronavirus toucheront une indemnité forfaitaire défiscalisée de 5 000 euros.

Ces mesures rassurent Mickaël Espadana, mais il reste inquiet, surtout si la crise dure dans le temps. “Mes employés sont en chômage pour cas de force majeure, les conditions ont été assouplies. Mais ils ne perçoivent que 70 % de leur salaire. Heureusement, pendant les trois jours qui ont précédé le confinement, nous avons fait de gros chiffres d’affaires grâce aux clients qui ont fait des stocks. Nous pouvons tenir encore un bon mois en payant les frais fixes. En revanche, si ça continue au mois de mai et au mois de juin, ça va devenir très compliqué. Pour l’instant, les loyers ne sont pas reportés et les crédits bancaires ne sont pas gelés.”

Forcément, il ne dort pas beaucoup, mais essaie de prendre la situation avec philosophie et un peu de résilience. “Le plus important, c’est de rester en vie, estime-t-il. Même si les magasins ont l’autorisation de rouvrir, je ne le ferai pas, au moins dans cette situation-là. Je ne veux pas mettre en danger la vie de mes employés, parce qu’on n’a pas de gants, pas de gel hydroalcoolique, pas de masque. J’avais fait un petit stock mais j’ai tout donné aux hôpitaux, qui n’en avaient pas la semaine dernière. Je me suis également équipé de protections en plexiglas pour mettre devant les comptoirs, quoi qu’il arrive cela me servira lors de la réouverture.”

Big Tobacco, chez lui à Bruxelles

Pourquoi en est-on arrivé à cette situation en Belgique ? Pourquoi tant de désintérêt, voire de mépris pour la vape ? “Le vapotage ne fait pas partie des préoccupations du gouvernement belge, répond Tanguy Doucenet. Comme les cigarettes se vendent partout, Il n’y a pas de buralistes comme en France, il n’y a pas de lobby organisé au niveau du terrain. Mais le lobby des cigarettiers est partout dans l’Union européenne, Bruxelles vit par l’Europe. Si vous enlevez l’Union européenne, Bruxelles est morte. Donc, forcément chez nous, il a plus de poids. Il y a quelques médecins, dont des pneumologues, qui soutiennent la vape, mais ils ne sont pas nombreux. Ils incitent leurs patients à passer à la vape dans leurs cabinets, mais personne ne s’engage médiatiquement.

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