Sommet de la vape 2019 “Les Français ont le droit d’être mieux informés”
Le 3e Sommet de la vape s’est tenu à Paris, lundi 14 octobre 2019. Près de 10 ans après l’apparition de la vape, en plein cœur d’une tempête médiatique relatant la dangerosité supposée de l’outil, la rencontre entre les différentes parties prenantes était l’occasion de refaire passer les bonnes infos.
Professionnels de santé, scientifiques, responsables de santé publique, professionnels du secteur et usagers… Près de 300 personnes avaient répondu à l’appel de l’association Sovape, au cœur de Paris. L’objectif ? Faire évoluer les regards et les mentalités sur la vape.
Un événement qui tombe à point nommé, quelques semaines seulement après le début de la polémique du vapotage suite aux décès de plus d’une vingtaine de personnes aux États-Unis.
Perte de confiance du grand public
Une première crise pour la vape, qui pourrait avoir des effets dévastateurs dans un avenir proche. Pourtant, il est important de rappeler que ces décès sont survenus suite à la consommation de produits trouvés sur le marché noir. Des produits illégaux, frelatés, et non reconnus par les autorités sanitaires comme propres à la consommation.
Mais le fait est là, la confiance en la vape chute. Un sondage BVA, réalisé en septembre 2019 et dévoilé lors du sommet, montre que les Français sont de plus en plus nombreux à penser qu’elle est nocive.
Ainsi, à la question : “Vous personnellement, que pensez-vous du vapotage par rapport à la cigarette et aux problèmes de santé ?”, près de 45 % ont répondu que la vape était aussi dangereuse que la cigarette. Pire, 15 % ont même indiqué que pour eux, la vape était plus dangereuse pour la santé que la cigarette. Alors que seulement 7 % savent que vapoter est moins risqué que fumer.
Les décideurs doivent prendre conscience de son utilité
Pourtant, depuis l’apparition de la vape, la consommation du tabagisme est en baisse constante, mais le vapotage souffre encore d’une mauvaise réputation.
Une perception négative qui provient notamment de l’image que renvoient les décisionnaires français sur le sujet. Selon Benoît Vallet, conseiller maître à la Cour des comptes et ancien directeur de la direction générale de la Santé, “les décideurs montrent encore une trop grande résistance face à l’utilisation de la vape.”
Si depuis son apparition, le vapotage permet de réduire de 100 000 le nombre de fumeurs par an, il reste associé à une notion de plaisir. Un élément qui a du mal à être accepté par les hautes autorités, alors que les substituts nicotiniques relèvent eux, de l’ordre du médical.
Aussi, les décisionnaires semblent inquiets d’une toxicité méconnue. Il est alors important de rappeler que les 1 200 e-liquides en vente sur le marché sont tous référencés et leurs compositions, connues. Surtout, ils ne comportent pas les 4 500 produits toxiques contenus dans une cigarette.
Enfin, le professeur Vallet a relevé l’insuffisance de publications et de formations destinées aux professionnels. “Les autorités sanitaires doivent encourager des études de recherches. Des documents sur lesquels pourront s’appuyer les professionnels de santé pour guider les patients qui souhaitent arrêter le tabac.”
Car oui, le vapotage est un outil de sevrage efficace et il faut le faire savoir. S’il est encouragé par les programmes de lutte contre le tabac, la communication autour, elle, ne suit pas. Alors que les Anglo-Saxons sont pro vape, la France en est, elle, encore loin.
Un outil comme porte de sortie du tabagisme
Au niveau des chiffres, selon une enquête menée par Santé Publique France en 2018, 3 % des hommes vapotent quotidiennement alors que les femmes sont, elles, 2 % à le faire, en France. Une enquête conduite auprès de 25 000 adultes, qui ont entre 35 et 44 ans et qui vapotent depuis plus de 20 mois.
Parmi eux, 58,6 % utilisent leur vaporisateur au motif d’arrêter de fumer, alors que 31 % s’en servent pour réduire leur consommation de cigarettes. Ainsi, 80,3 % des vapofumeurs (tabac et vape) ont réussi à diminuer leur consommation de cigarette de 18 à 10 cigarettes par jour. Alors que 76,3 % des ex-fumeurs, vapoteurs, déclarent que l’ecig les a aidés à arrêter de fumer. Des chiffres criants, mais qui ne parviennent pas à convaincre les sceptiques de la vape.
Toujours pas une porte d’entrée vers le tabac
À défaut d’une porte de sortie, certains y voient même une porte d’entrée vers le tabac pour le public adolescent. Un sujet abordé par David Levy, professeur à l’université de Georgetown (Washington, D.C.), auteur de 250 publications, soutenu par l’OMS et spécialisé dans l’évaluation des consommations de tabac et vapotage.
Ses équipes ont réalisé des travaux qui prouvent que depuis l’apparition de la vape aux États-Unis, aux alentours de 2013, le taux de tabagisme a chuté de 50 % chez les 18-24 ans.
“Une telle baisse n’a jamais été observée auparavant, maintient le professeur Levy. Il devient donc avéré que, même chez les adolescents, la vape a un impact positif. Il n’y a pas d’effet d’initiation au tabac par le biais de celle-ci”, a asséné le professeur Levy.
En France, grand pays consommateur de tabac et de cannabis, la vape rencontre un certain succès auprès du public adolescent.
Une enquête, menée par l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT), a permis de déterminer que 17,5 % des lycéens français avaient un usage quotidien de la cigarette électronique, alors que 55 % avaient déjà essayé.
Des données qui correspondent à la dynamique inverse et la chute du tabagisme dans cette même tranche d’âge.
L’étude menée auprès de 40 000 lycéens, entre 2015 et 2018 a aussi permis de faire la lumière sur les motivations de ces jeunes consommateurs à se tourner vers la vape.
48 % vapent pour le goût, 28 % pour arrêter de fumer et 31 % parce que l’e-cigarette leur semble moins dangereuse que la cigarette. Notons également, que le taux d’abstinents (ni cigarette, ni vape, ni chicha), a augmenté de 31 à 34 %, de 2015 à 2018.
“Nous ne pouvons apporter qu’une observation encore limitée sur les usages de la vape, a confié Stanislas Spilka, responsable du pôle des enquêtes et des analyses statistiques à l’OFDT, mais aucune des données françaises ne permet de soutenir qu’elle est une porte d’entrée vers le tabagisme.”
Passer du tabac à la vape, pour réduire les risques de cancer
“On relatait 382 000 nouveaux cas de cancer en 2018, a expliqué Antoine Deutsch, responsable projets à l’Institut national du cancer. La majorité de ces cancers touchent les poumons, la prostate et le côlon chez l’homme. Et le sein, les poumons et le côlon chez la femme.”
En revanche, si l’on fume, on augmente les facteurs qui favorisent l’apparition d’un de ces 3 cancers de 73,9 %. “Le vrai combat est donc de lutter contre la fumée du tabac, s’est indigné Antoine Deutsch, et non de tenter d’en créer de nouveaux avec la vape.”
On ne trouve pas de cancérigènes avérés dans la vape, dans l’état actuel des études.
De plus, la baisse des risques de cancer chez les fumeurs de tabac qui deviennent vapoteurs est significative, la vape contenant de 10 à 20 composés chimiques, contre plus de 4 000 pour la fumée de cigarette.
Vaper n’est pas non plus anodin, donc les autorités sanitaires déconseillent le produit aux non-fumeurs, mais passer du tabac à la vape réduit substantiellement les principaux risques pour la santé. Aujourd’hui, l’Institut national contre le cancer soutient la vape, “et nous sommes la seule agence d’État à le faire”, a souligné Antoine Deutsch.
“La combustion tue ! La désinformation aussi…”
C’est le cri du cœur qu’a lancé Jacques le Houezec, tabacologue et professeur associé à l’université de Nottingham. Une phrase coup de poing en référence à l’idée selon laquelle la nicotine est la base de tous les maux liés au tabagisme. Un composant que l’on retrouve également dans les e-liquides et qui, de ce fait, diabolise l’utilisation de la vape.
Or, “le problème du tabagisme repose sur la combustion d’un végétal. C’est la fumée qui est responsable des maladies dues au tabagisme, pas la nicotine”, martèle Jacques le Houezec.
Il est donc nécessaire que le message, “on se trompe d’adversaire quand on parle de la nicotine”, soit répété. Passer à la vape n’amène pas à l’addiction, la diffusion par vapotage étant trop lente. Ça reviendrait à reprocher aux gens qui boivent du café d’en consommer au prétexte que c’est mal. Personne ne le fait. Eh bien, le principe actif entre la nicotine et la caféine est le même.Rassurer, convaincre, mieux communiquer. Dans un contexte conjoncturel et médiatique compliqué, le 3e Sommet de la vape est revenu aux basiques. La vape doit être présentée par les autorités sanitaires comme un outil d’aide au sevrage du tabac. Une meilleure communication, une meilleure information des personnels soignants et du grand public doivent être instaurées pour gagner le combat contre la cigarette, grâce à la vape.